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Articles

Affichage des articles du novembre, 2011

fortuité

En anglais, on appelle serendipity le fait d'effectuer une découverte inespérée. On cherchait quelque chose, on en trouve une autre. Et cette autre chose s'avère plus importante, plus précieuse, plus fructueuse. Internet est un lieu de recherches propice à de telles trouvailles. Inventé par Horace Walpole [ ci-contre portraituré par Ramsay, et ci-devant Comte d'Oxford ] en 1754, le mot serendipity a été importé par certains dans notre langue sous sa forme francisée sérendipité . Un peu pédant, très obscur, ce néologisme n'a pas eu grand succès dans le langage courant. Des Canadiens francophones lui ont récemment (vers 2000) trouvé un substitut autrement plus savoureux : la fortuité . Plus concis que la sérendipité [trois syllabes au lieu de cinq], plus euphonique et plus lumineux, le mot fortuité est immédiatement compréhensible. En prime, il agrandit à point nommé la petite famille déjà composée du couple fortuit et fortuitement , qui l'adopte sans hésit...

Les 24 prochaines heures ou les prochaines 24 heures ?

À l'occasion d'une affaire de spéculation banquière, un journal télévisé s'interroge sur " les fameux cinq milliards " envolés. Au lieu des " cinq fameux milliards ".  Quel professionnel francophone de la langue écrite ou parlée peut se permettre d'ignorer qu'en français, l' adjectif cardinal [ici, " cinq "] doit toujours être placé avant le qualificatif [ici, " fameux "], jamais après lui ? Aucun. Car parmi leurs lecteurs et auditeurs, qui ignore qu'en français on a deux beaux enfants , et non " beaux deux enfants " ? Personne. Cette règle instinctive de la juste place de l'adjectif cardinal vaut pour les cinq fameux milliards comme pour les 24 prochaines heures et les 48 dernières heures . Tandis que "les prochaines 24 heures" (sic) ou "les dernières 48 heures" (sic) n'appartiennent pas à notre langue mais relèvent de la grammaire anglaise ( the last two days ), dont l...

loin s'en faut

Très prisée de certains orateurs politiques et commentateurs médiatiques, l'expression " loin s'en faut " (sic) est une contorsion vide de sens, qui résulte de l'hybridation difforme de deux ou trois expressions, toutes parfaitement correctes quand on ne les mélange pas : loin de là et il s'en faut de beaucoup ou il s'en faut de peu , avec un zeste de loin de moi cette idée. On s'étonne que des êtres doués de raison, et ayant pour mission ou pour ambition de régler le fonctionnement de la vie sociale, s'égarent à ce point dans l'absurde et soient à ce point privés de la capacité de s'assurer qu'une formule dont ils se gargarisent possède bien une queue et une tête. Car vraiment,  c'est quoi Monsieur le Sénateur un loin qui s'en faut ? Vous pouvez nous en faire l'analyse grammaticale ? Certes non. Vous qui ne pérorez pas dans les médias, n'allez pas non plus imaginer que " loin s'en faut " vous fer...

toujours très très

La tendance emphatique à redoubler, voire tripler, l'adverbe très n'est toujours pas en régression mais s'installe au contraire depuis maintenant quatre ans dans le français médiatique. " Nous vous souhaitons une très très bonne année " (France 2). " Le matin, il fera très très froid en région parisienne " (France 3, à propos d'une météo prévoyant tout juste un degré au-dessus de zéro, ce qui n'est pas sibérien). " Une exposition très très intéressante " (France Inter). " Concerts très très privés " (RTL). Bien entendu, ce tic de langage fait tache d'huile dans le public. Et c'est le français qui dérape. Et surtout, qui s'appauvrit. Car le redoublement de très très , toujours suivi d'une adjectif relativement pauvre ( froid, bon, intéressant , etc) sert aussi à se dispenser de puiser dans le vocabulaire foisonnant de la langue française un terme qui exprime avec justesse la très-très-tude , sans le secour...