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Affichage des articles du 2020

cartonner, faire un carton, carton plein

La différence de niveau de langue entre " peu import e " et '' je m'en branle " ou " j'men tape " semble échapper à une cohorte d'orateurs professionnels, et spécialement aux présentateurs et journalistes de télévision et de radio qui sont en train d'abandonner collectivement les mots succès , victoire et triomphe au bénéfice de leur synonyme argotique carton ("faire un carton"). Pour une écrasante victoire , ils vont parfois jusqu'au " carton plein ", comme s'il s'agissait d'un carton de déménagement ou d'une grille du loto traditionnel pleine de pions gagnants, alors qu'initialement la dérive argotique du mot carton , au sens de succès foudroyant , vient de la cible en carton du stand de tir dont on réussit à atteindre le centre. Le festival de Cannes 2015 honore-t-il 100% de films français par ses trois distinctions les plus en vue ? Pour les présentatrices des deux grandes cha

lynchage et bavure

  À propos du passage à tabac d'un suspect par un trio de policiers en marge d'une manifestation ayant échauffé les esprits et quelques véhicules livrés aux flammes, de nombreux commentaires médiatiques, juridiques et politiques ont été faits. Il s'est avéré que le sens du mot lynchage , que l'on croyait terriblement limpide, en venait à faire débat. Ainsi, le Premier-Adjoint au maire de la plus grande ville de France, dans laquelle cette manifestation violente eut lieu, déclara-t-il sur le plateau de FranceInfo TV mot pour mot ceci : " Nous sommes plus proches d'un lynchage que d'une bavure ". Or, non. Nous sommes pile dans une bavure et hors du lynchage . Car la terminologie est la suivante : • la bavure est un abus commis par des représentants de la force publique égarés ; • le lynchage est une exécution sommaire commise par une foule emportée ; • le crime de guerre est une atrocité commise par des militaires dévoyés. Mais il y eut simultanémen

présumés coupables et présumée ignorante

"Pourquoi est-ce que les médias ne donnent pas les noms des présumés assassins, des présumés violeurs ?" (Marine Le Pen, présidente de parti politique, 16 juillet 2020) Encore débutante ou déjà chenue, lorsqu'on est une oratrice professionnelle de langue maternelle française, on connaît le sens du verbe présumer : "Croire d'après certains indices, se faire une conviction sans preuves" . On obtient du même coup la réponse à la question ci-dessus, faussement naïve et délibérément dévastatrice des libertés primordiales : on ne désigne pas comme coupables des personnes que l'on croit violeuses ou meurtrières selon certains indices mais SANS PREUVES . Cela évite les lynchages et, plus généralement, les dénonciations calomnieuses et les condamnations sans preuves ni jugement, qui sont des barbaries. Par ailleurs, Mme Le Pen - qui est juriste de formation - exploitait ici la légitime émotion suscitée par un homicide par violences volontaires ayant

les mal logés et leur logement désolant

À l'heure où la difficulté de se loger dignement atteint un degré critique pour une frange toujours plus large de la population mondiale, le débat francophone sur les mal logés dérive vers un débat sur le mal-logement (sic). Le fléau se double alors d'une maladresse. L'invention du terme mal-logement reflète une très mauvaise maîtrise des mécanismes de la langue française, qu'il s'agisse de syntaxe, de sémantique ou d'orthographe. Sur le plan orthographique, le trait d'union est injustifié : en français, le manque d'adresse est maladresse et non "mal-adresse" ; le contraire de la bienveillance est la malveillance et non la "mal-veillance" ; une denrée putride est malodorante et non "mal-odorante" ; etc. Pour ne pas contredire les règles orthographiques du français, il faudrait donc écrire ainsi ce néologisme : mallogement . Or, cette orthographe met en lumière la malformation (et non la "mal-formation"

colocataires

On a pu constater après l'an 2000 une tendance à la féminisation erronée du mot colocataire , transformé à tort en " colocatrice " (sic). Alors même que personne ne songe à parler d'une " locatrice " au lieu d'une locataire.  Cette tendance est en légère régression. On peut espérer sa disparition. Car la désinence -trice est le féminin de la désinence -teur , et d'elle seule. Un lecteur, une lectrice ; un inspecteur, une inspectrice ; un dessinateur, une dessinatrice . Mais les mots se terminant par -aire , eux, ne varient pas du masculin au féminin ! Un propriétaire n'a pas pour homologue une " propriétrice ", mais une propriétaire ... De même pour adversaire, récipiendaire, milliardaire, millionnaire ou locataire qui peuvent être masculins ou féminins. Le sachant, un locataire et sa colocataire vécurent heureux et eurent beaucoup de petits colocataires. Mais pas une seule "colocatrice"... CLIQUEZ ICI POUR ACCÉDER

chefs cuisiniers et chefs cuisinières

Pourquoi le néologisme " cheffe cuisinière ", que l'Académie française vient d'entériner très à contre-cœur et donc bien à tort, est-il instinctivement perçu comme difforme par la majorité des lecteurs du français ? En raison de sa féminisation ? Pas du tout. Ou pas directement. Chef cuisinière est irréprochable. Mais la variante "Cheffe" heurte le sentiment linguistique francophone en raison de l'incongruité de sa graphie. La transformation du -ef terminal de chef en ce lourd -effe terminal de "la cheffe" est vain, puisqu'il suffit de former la féminisation sur le modèle de la nef en écrivant sobrement : la chef . Cette féminisation mieux inspirée ne se calque pas par erreur sur le modèle de '' la greffe '' au lieu de " la nef ". Pourquoi par erreur ? Parce les adeptes de cette lourdeur n'ont pas vu que " la greffe " n'était pas le féminin d'un quelconque "le gref" ! Plus

compter de zéro à sans

Sans aucun doute, " zéro doutes " et " zéro défauts " ne sont pas sans défaut. Au gré d'un infantilisme langagier indéniable, le marketing a un jour remplacé la préposition " sans " par le nombre " zéro ". Pour vendre, par exemple, du " Coca-Cola zéro sucres ". Avec un S de pluriel fautif à " sucres ", comme si zéro était un nombre supérieur ou égal à 2, quantité minimale exigée pour un pluriel. Ou plutôt, comme si zéro devenait la nouvelle préposition exprimant l'absence, en lieu et place de sans. Or, contrairement au chiffre zéro, l'irremplaçable terme sans est seul apte à être suivi d'un pluriel. En effet, la notion d'absence qu'il exprime ne coïncide pas forcément avec un singulier. Prenons cet exemple : " sans enfant " ou " sans enfants " ? Réponse : les deux. Car un couple sans enfant demandera à ses amis de venir sans enfants. Ce couple n'a pas d'enfant, p

confinement : chez soi, chez nous, chez vous, chez eux

Alerte à la faute de syntaxe dans le texte de l'annonce télévisée du gouvernement français à l'attention des enfants et adolescents, concernant le confinement à domicile. Elle se conclut par : " Il faut tous rester chez soi " (sic). Non. Car soi est le pronom d'un singulier indéfini, et non d'un pluriel comme tous . Pour respecter la grammaire élémentaire de notre langue et le sens de ce message, ce " tous " impératif ne peut s'analyser que comme un synonyme de nous , vous ou ils. Ce qui se conjugue ainsi :  "il NOUS faut TOUS rester à la maison" donc chez NOUS" ; "il VOUS faut TOUS rester à la maison" donc chez VOUS" ; "il LEUR faut TOUS rester à la maison" donc chez EUX". Pas trace de ON, donc pas de place pour SOI.   L'erreur se corrige facilement en supprimant TOUS, ce qui restitue au moins à l'ensemble concerné son caractère indéfini, sinon singulier : " Il

influenceuse, influenceur

Ce malheureux jeune homme, emporté par une surdose de produit stupéfiant à 17 ans, était " influenceur beauté ". Par ce charabia juxtaposant deux termes sans lien syntaxique, il faut comprendre qu'Ethan prodiguait aux internautes des conseils de maquillage et de coiffure.  Telles autres personnes seront " influenceuses voyages "si leur activité consiste à vous rendre désirables des destinations touristiques, par la publication sur internet de leurs propres séjours là-bas. Les destinations en question les rétribuent en retour, directement ou indirectement, Influenceurs ... Quel intitulé de fonction... Quel concept affligeant... Il suppose que nous aurions besoin des services de personnes dont le métier ne serait pas de nous conseiller, nous orienter ni nous aider, mais plus insidieusement de nous "influencer". Ce nom de métier résonne comme une revendication anti-darwinienne : c'est fini, l'homme ne descend plus du singe mais du mouton d

avoir ou donner des enfants

Sous la diffusion en ligne d'un très intéressant documentaire vidéo de Yann Lagarde sur l'inventeur britannique du culturisme, Eugen Sandow, un auditeur de France Culture laisse ce commentaire réprobateur : " Je réagis à ceci : "Il épouse une femme dont il a deux filles"... étonnante manière de dire les choses. Je pensais qu'on avait des enfant avec une femme, alors que j'ai des poules dont je mange les œufs ." L'émotion de l'auditeur n'est pas fondée. Car cette manière d'évoquer la fertilité d'un couple humain n'est ni étonnante ni déplaisante. C'est une des expressions usuelles du français, courant et littéraire, pour exprimer la chose. Il ne faut pas voir le mal où il n'est pas. Car cela peut se dire de diverses manières courantes, dont aucune n'est critiquable.   Les deux premières sont interchangeables entre femme et homme : • " Elle épouse Lionel dont elle aura un fils " (le choix irréprochable de

"sur" : la préposition qui tue

L'invasion de la préposition " sur ", phagocytant toutes les autres, est assurément le plus grand fléau d'appauvrissement qui ait frappé la langue française en France depuis un quart de siècle. Excellent locuteur, généralement au-dessus de toute critique langagière, l'académicien des sciences morales et politiques et éditorialiste français  Alain Duhamel s'y laisse piéger à l'occasion : " Nous sommes toujours sur la même difficulté ."   (CNEWS, 1er juillet 2020) La préposition sur est ici employée à tort à la place de : • face à  la même difficulté • devant   la même difficulté • confrontés à   la même difficulté . Autre éventualité : on note que les tournures  "vous êtes sur" ou  "on est sur" ou "nous sommes sur " sont désormais de banales calamités devenues synonymes du démonstratif " c'est ". Le gallicisme qu'on supposait irremplaçable est détrôné. Porté par cette tendance qui ne l'eut p

support papier : le monstre administratif indécrottabe

Sachant que le papier est par nature un support, il est inapproprié de le préciser dans la formule " sur support papier ", comme il serait inapproprié de voyager " en véhicule voiture " ou de servir le beaujolais " dans un récipient verre ballon ". Cette précision superflue, appelée périssologie, se double ici d'un viol de la grammaire : qualifier un terme à l'aide du mot papier , notre langue ne le permet pas car le mot papier n'est pas un adjectif ! Les choses ne sont pas " papier ", elles sont en papier ou sur papier ou de papier [telle notre licorne]. Le français connaît les industries papetières (industries du papier), les cocottes en papier et les corbeilles à papiers , mais ne connaît pas les documents papiers (sic), les versions papier (sic), les annuaires papier (sic), le support papier (sic) ni les objets " papier " d'une manière générale.  Les formules employant le mot papier comme qual

les misères du son Ê en fin de mots

"Vous aviez dit que vous ne feriez plus d'interviews du 14 juillet, que c'étez terminé."   (Léa Salamé, journaliste interrogeant le président de la République française, 14 juillet 2020) Dès son entrée en matière, cette intelligente locutrice professionnelle dépourvue de tout accent régional, promeut une envahissante coquetterie de la diction médiatique : la préciosité articulatoire par laquelle les terminaisons de étiez et était  ne sont plus différenciées. Et cela au détriment du son Ê, déformé en son É.  Ainsi, lait et laid deviennent-ils lé . Et ainsi la prononciation de nos verbes au conditionnel et à l'imparfait devient-elle plus qu'imparfaite... Les sons -AIS, -AIT et -AIENT, très caractéristiques de ces temps de conjugaison, sont trahis comme par des illettrés qui croiraient bon de les réécrire à leur guise : "je voudré vous voir, tu été parti, elles pleurez de rage". Ce que Mme Salamé prononce ici C'ÉTEZ (ou SÉTEZ ou C'

réprimer ou réprimander ?

"Plusieurs villes réprimandent l'absence de port du masque" (nous dit un journaliste de télévision lisant son prompteur) C'est mignon tout plein, mais c'est faux : ces communes ont décidé de RÉPRIMER l'absence de masque. Au-delà de l' admonestation, puis de l' avertissement , leurs maires ont décidé que l'heure n'était justement plus aux réprimandes mais aux amendes à 130€. Donc à la répression, qui est le fait de réprimer et non de réprimander . De plus, on ne réprimande pas une faute mais une personne qui la commet. Car réprimander est synonyme de gronder . CLIQUEZ ICI  POUR ACCÉDER À LA PAGE D'ACCUEIL DU SITE DE LA MISSION LINGUISTIQUE FRANCOPHONE

esquimau

" Un glacier-pâtissier danois renonce au terme esquimau, qu'il juge offensant pour ce peuple " (information parue dans le quotidien 20 Minutes, 28 juillet 2020) Zut, il va falloir renoncer à lapin chasseur , offensant pour les lagomorphes et les fines gâchettes, à charlotte aux fraises , offensant pour les Charlotte, à Paris-Brest , blessant pour les cheminots, à éclair au chocolat , moqueur envers Zeus et sa foudre, à daube provençale car c'est pas de la daube quand même la Provence ! Il va falloir aussi renoncer à cravate , déformation offensante de l'adjectif ethnique croate , et ne plus pendre à nos oreilles des créoles ni nous chausser de spartiates . Cette stupidité bien-pensante procède d'une perte de repères linguistiques : dans de telles métonymies gourmandes ( esquimau pour crème glacée, flûte pour verre de champagne ou son contenu, Brillat-Savarin fromage empruntant le nom de famille d'un gourmet) il y a au contraire hommage aux not

s'exposer (selon Alice Coffin)

"En ne conduisant pas, je m'expose à ne pas mourir sur la route." (paraphrase d'une déclaration faite par une élue municipale française du nom d'Alice Coffin à une chaîne de télévision étrangère) Nous paraphrasons ici avec la plus grande fidélité dans le contresens une déclaration d'une conseillère municipale parisienne dont la violence diffamatoire à l'encontre de la moitié masculine de ses électeurs a fait tressaillir d'indignation ou sauter de joie, mais dont le mauvais maniement de la langue n'a pas même été relevé dans ce tohu-bohu. Voici la déclaration accusatoire dans sa forme originale : " En n'ayant pas de mari, je m'expose à ne pas être violée, tuée, tabassée (...) et mes enfants non plus ". Or, la formule verbale " s'exposer à"  ne peut introduire qu'un complément négatif. On s'expose à mourir en allant à la guerre, on s'expose à échouer à un concours en s'y présentant. Mais on n

un bien-cuit

"Alexandre Barrette sert un bien-cuit à Ludivine Reding." (Jean-François Vandeuren, Huffington Post Québec, 23 juillet 2020) Les francophones non canadiens ne peuvent que saluer bien bas la détermination des Québécois à parler français contre vents et marées. Aucune faute de français dans le titre ci-dessus, en dépit de son obscurité pour la plupart d'entre nous. Au contraire : un bien-cuit est la francisation de roast , terme désignant une réception donnée en l'honneur d'une personne qui fera l'objet de vacheries bien senties mais dont toute méchanceté sera désamorcées par l'outrance même des attaques. Par exemple, au cours de ce bien-cuit, Alexandre Barrette dit à Ludivine Reding : " Il y a des choses qui ne sont pas belles dans la vie, comme la guerre, le racisme et la manière dont tu fais tes créneaux ." Tandis qu'au Canada les chaînes francophones organisent des bien-cuits , en France elles nous servent des talk shows de prime

ministres démis de leurs fonctions

"Victoire. Les ministres B..., C..., P... enfin démissionnés." ( Jean-Luc Mélenchon, Twitter, 5 juillet 2020) Voilà un barbarisme peu digne de l'éloquence de ce tribun. Car des ministres DÉMISSIONNENT ou SONT DÉMIS (de leurs fonctions), mais ne sont pas "démissionnés". Ni eux ni personne.  De même, une personne qui s'alimente n'est pas "mangée", elle mange. La confusion entre les significations d'un même verbe selon qu'il est employé à la forme active ou passive est en principe une erreur qu'on ne commet plus au sortir de l'école élémentaire ; faute de quoi on n'est pas admis au collège. Et moins encore admis à rédiger des messages officiels, fussent-ils révolutionnaires ou révoltés. Veillons avec soin sur toute langue vivante, vivante donc fragile. Car il est une forme d'insoumission à la structure porteuse du langage qui ne grandit personne et ne lutte pas dans le bon sens. POUR ACCÉDER À LA PAGE D

"sur" dépasse les bornes

"Ce dont on parlait sur les travailleurs." (Manuel Bompart, député français et docteur en mathématiques, 6 juillet 2020) La préposition SUR est ici employée inconsidérément à la place de l'un des termes POUR ou À PROPOS DE ou CONCERNANT, qu'elle phagocyte. " Ce dont on parlait pour les travailleurs " ou " ce dont on parlait à propos des travailleurs " ou " ce dont on parlait concernant les travailleurs " ,  voulait probablement dire cet orateur politique de langue maternelle française. Ou peut-être : "ce qu'on disait sur les travailleurs". Pour mieux comprendre quelle intrigue se noue dans notre feuilleton estival autour du petit mot de trois lettres sur devenu fou dans la langue de France contrairement à la plupart des autres pays francophones, résumons les épisodes précédents de ses méfaits. En moins d'une semaine, sur a été surpris à torpiller sans sommations les mots suivants : • à (avec les tristemen

feuilleton estival de la langue mal pendue [4]

4• " Ils vont devoir me remettre une stratégie zéro déchet dans les trois mois . " (Brune Poirson, dans ce clip officiel produit par le ministère français de la Transition écologique et solidaire, 4 juillet 2020) " Remettre une stratégie zéro déchet " ? Mme Poirson est-elle bien sûre de ce qu'elle dit et de la manière dont elle le formule, après mûre réflexion en compagnie de ses conseillers et avec la bénédiction de sa ministre de tutelle ? Manifestement, oui, elle en est satisfaite. Elle se fait même filmer le disant, et sous-titrer pour enfoncer le clou. Triple faute, pourtant. Condensées en trois mots, ces trois fautes ou erreurs révèlent un niveau stagnant de pollution culturelle de la langue, mazoutée par les solvants du marketing, asphyxié par le jargon et le compactage d'une pensée réduite à ses seuls mots-clefs . A/ Le choix du verbe est impropre : en français on ne " remet " pas une stratégie, à moins de la remettre à

feuilleton estival de la langue mal pendue [2]

" Vous avez été ministre en charge de la santé. " (Brigitte Bourguignon, Assemblée nationale française, 2 juillet 2020) Depuis des années, c'est la tournure anglophone " in charge of " qui est ici francisée mot à mot, par négligence et par suivisme, pour donner  EN CHARGE DE  au détriment de  CHARGÉE DE " Vous avez été ministre CHARGÉ DE la santé" ou plus simplement encore "vous avez été ministre DE la Santé", voulait dire la présidente de la commission parlementaire, elle-même  chargée de  se pencher sur les éventuels faux pas du bal masqué sanitaire. Les organisations publiques et privées seront bien inspirées de mettre à profit les semaines d'été pour rectifier cette faute dans leurs organigrammes. Nous invitons leurs dirigeants et leurs interlocuteurs à se convaincre de cette nécessité en se souvenant que l'on porte le titre de Chargée ou Chargé de mission et non celui de "En charge de mission". De même,

des temps difficiles (et non compliqués)

"Merci de diffuser de la bonne musique en ces temps compliqués." (au courrier des auditeurs de France Musique, 11 juin 2020) Fausse note : le mélomane qui a eu la courtoisie de prendre le temps de remercier Radio France voulait en réalité évoquer des temps difficiles et non "compliqués". Nous avons déjà analysé en détail cette atrophie croissante du vocabulaire causée par la focalisation obsédante et paresseuse sur le qualificatif compliqué ,  au détriment de dizaines d'autres termes plus adaptés et plus fins. Mais il se confirme e mois en mois que la substitution s'effectue en premier lieu au détriment de difficile , comme dans cet exemple. Les temps difficiles sont un syntagme, une "expression figée" bien connue. Hélas, le déferlement des compliqués dans la langue des médias depuis 2010 a submergé les cerveaux au point que même le vocabulaire du plus aimable et du moins inculte des auditeurs s'y noie ou s'y enlise. Le recours

Le Monde choisit les autrices

Le 29 mai 2020, se pliant de bonne grâce à la préconisation de l'Académie française, le célèbre quotidien francophone Le Monde a décidé d'abandonner la maladroite féminisation purement graphique "auteure", et d'opter pour la féminisation en profondeur autrice , dont le son et l'image s'allient pour distinguer, avec netteté, ce féminin du masculin ou neutre  auteur . Nous ne pouvons que l'en féliciter et inviter le monde entier à faire de même. AUTRICE s’harmonise avec actrice . Mais surtout avec lectrice, rédactrice et toute la chaîne de l'écriture et de la lecture ( éditrice , correctrice, traductrice, etc), comme auteur s'harmonise avec lecteur, rédacteur et toute la chaîne précitée. Cette cohérence interne est salutaire à toute langue vivante :  elle en consolide la clarté et la simplicité au lieu de les saper. AUTRICE sonne aussi agréablement qu’ actrice, cantatrice, médiatrice, institutrice , éducatrice , directrice , et t