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avoir ou donner des enfants

Sous la diffusion en ligne d'un très intéressant documentaire vidéo de Yann Lagarde sur l'inventeur britannique du culturisme, Eugen Sandow, un auditeur de France Culture laisse ce commentaire réprobateur :
"Je réagis à ceci : "Il épouse une femme dont il a deux filles"...étonnante manière de dire les choses. Je pensais qu'on avait des enfant avec une femme, alors que j'ai des poules dont je mange les œufs."

L'émotion de l'auditeur n'est pas fondée. Car cette manière d'évoquer la fertilité d'un couple humain n'est ni étonnante ni déplaisante. C'est une des expressions usuelles du français, courant et littéraire, pour exprimer la chose. Il ne faut pas voir le mal où il n'est pas. Car cela peut se dire de diverses manières courantes, dont aucune n'est critiquable.
 
Les deux premières sont interchangeables entre femme et homme :
• "Elle épouse Lionel dont elle aura un fils" (le choix irréprochable de France Culture).
• "Elle épouse Lionel avec qui elle aura un fils" (la préférence irréprochable de l'auditeur).
 
La troisième manière est la seule qui souligne le rôle prépondérant de la maternité dans la venue des enfants au monde, et sa générosité :
• "Il épouse une femme qui lui donnera deux filles".
Donc, rien à voir avec la ponte des œufs par la poule, à moins d'une misogynie d'une violence extravagante - qui n'anime certainement pas l'auditeur réprobateur, au contraire.
Ou à moins d'un ultra-féminisme acerbe voyant l'homme comme malfaisant quoi qu'il fasse ou dise, et même dans l'expression de sa tendresse paternelle et de son admiration pour la maternité.

* * *
 
S'il y a quelque chose à reprocher au texte de ce documentaire de France Culture (donc de culture francophone), c'est plutôt l'usage répété de l'anglais bodybuilding et bodybuilder au lieu de culturisme et culturiste. Comme le rappelle l'Académie française : dire les choses en anglais dans un discours en français ne leur confère ni plus de prestige ni plus de modernité. Charles de Gaulle lui-même adressa en 1962 une remontrance écrite à son ministre des armées : "Veuillez donner des instructions pour que les termes étrangers soient proscrits chaque fois qu'un vocable français peut être employé. C'est-à-dire dans tous les cas."
 
On ne saurait mieux dire en 2020, non seulement aux ministres mais à tous les bataillons de publicitaires, commentateurs, journalistes, essayistes, enseignants et responsables politiques, lorsque leurs viennent aux lèvres hub, cluster, open space, open bar, running, strapping, free style, mano a mano, mercato, biopic, featuring, cameo, start-up nation, consultant, greenwashing, matcher, spoiler, impacter, ou même l'adverbe live devenu particulièrement ignare sous sa forme franglaise redondante "en live" (qui signifie littéralement "en en public" ou "en en direct").
 
Avec une mention d'anti-gaullisme linguistique hors concours aux communicants gaullistes de l'État français qui sont allés jusqu'à nous chercher une onomatopée étrangère pour intituler un site officiel du ministère des finances... oups.gouv

 

 

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