Accéder au contenu principal

Articles

Affichage des articles du mai, 2020

liaisons mal t'à propos

"Des ex-e-z'employées municipales l'accusent."   (un journaliste de BFM TV, flash-back de mai 2011 concernant la pratique de la réflexologie par Georges Tron, ministre démissionnaire) La foule des professionnels de la parole qui pratiquent la paragoge ne cesse de grossir. La paragoge consiste à prononcer une voyelle qui n'existe pas. Cette faute de phonétique était autrefois réservée aux enfants en bas âge et aux accents méridionaux emportés par leur fougue chantante. Lorsque le journal Ouest-France devient " Ouest'e-France ", il y a paragoge. Quand l' ex-femme devient ex'e-femme ou quand l' expatrié devient ex'e-patrié , il y a paragoge. Et quand un commentateur professionnel de l'actualité politique nous parle des accusatrices d'un ministre démissionnaire en les désignant, non pas comme d'ex-employées municipales ni, par paragoge, comme des "ex'e-employées", mais carrément comme des "ex

de l'enfance à l'enfonce

Après l'éviction du son " -ê- " en fin de mots, remplacé par le son " -é- " ( sifflet devenant sifflé ; j'avais devant j'avez ), et la perte de distinction entre le " -o- " ouvert (o de bol ) et " -Ô- " fermé (o de beau ), le style oratoire médiatique de France nous apporte maintenant la mutation du son " -en- " en son " -on- ". Dans la bouche de l'excellente Fabienne Sintès comme celle de la chatoyante Léa Salamé (Radio France), par exemple, enfance devient on fonce ; pente devient ponte ; l'attente devient la tonte , etc. Pour comprendre ce phénomène apparu en France peu avant 2010, il faut savoir que la prononciation de la nasale " -on- " demande un tout petit peu moins de travail musculaire que la prononciation de la nasale " -en- ". L'économie d'effort est certes négligeable, mais elle suffit au mieux-être des orateurs enclins à cette paresse articulatoire. La Mi

demander à ce que

En France, on commence à entendre dire " je demande à ce que ". Et même : "il faut vérifier à ce que" (pour il faut vérifier que ) et "ça va permettre à ce que" (pour ça va permettre de ). Cette difformité grammaticale majeure est capable d'affecter aussi bien un colonel de pompiers s'exprimant au micro de France Inter qu'un premier adjoint de la mairie de Paris (notre photo) intervenant dans le journal de France 3. L'Académie française, elle aussi, a relevé cette fâcheuse apparition et en cerne mal l'origine dans l'esprit des orateurs ne sachant plus dire simplement et correctement " je demande que " ou " je vérifie que ". Ce télescopage fautif est peut-être le résultat de l'amalgame entre deux tournures correctes : je demande à [ je demande à être informé ] parasité par une dose de   je demande que   [ je demande que l'on m'informe ]. On peut aussi supposer que cela résulte d'une inte

distanciation physique ou sociale ?

Fallait-il copier servilement l'anglais et parler de " distanciation sociale " ou fallait-il préférer " distanciation physique ", formule moins suspecte de ségrégation ? Ni l'un ni l'autre. Car notre langue dispose d'une ressource plus sobre : le pluriel du mot distance, grâce auquel "garder ses distances " dit tout, sans qu'il soit besoin d'un qualificatif. Encore fallait-il que les divers conseillers ministériels et les divers commentateurs linguistiques s'exprimant dans les médias n'aient pas pris trop de distance avec la simplicité et la subtilité intrinsèque du français courant. Illustration : épicier masqué conservant ses distances à Saint-Jean-de-Fos, France POUR ACCÉDER À LA PAGE D'ACCUEIL DU SITE DE LA MISSION LINGUISTIQUE FRANCOPHONE,  CLIQUEZ ICI

communauté de communes : un contre-pléonasme

Il existe en France mille et une communautés de communes [en 2019 : 1001 exactement !]. Appellation politique tellement grotesque que les francophones sains d'esprit et de langue ont d’abord cru à un canular. Cette désignation apparue en 1995 doit son ridicule involontaire à ce qu'on appelle en littérature un contre-pléonasme . Le pléonasme juxtapose des termes différents exprimant une idée très semblable ( la pluie humide ). Dans communauté de communes , il y a juxtaposition de termes très semblables exprimant deux idées différentes :  commune signifie ici ville ou village, tandis que communauté signifie union. Ceux qui sont instinctivement heurtés par le contre-pléonasme de la communauté de communes ont donc une bonne raison de l'être. Mais tous les créateurs de néologismes administratifs n'ont pas l'ouïe si chatouilleuse ni l'esprit aussi vif. Ils ne nous surprendront guère en inventant bientôt la " communauté communautaire de communes communales com

le ou la COVID : faut-il en faire une maladie ?

Après les tensions sociales et psychologiques suscitées par la peur du virus lui-même, des tensions d'ordre grammatical sont apparues à la faveur de la pandémie déclenchée par ce mal dénommé covid-19*. Ou plus exactement, à la suite d'une recommandation de l'Académie française préconisant tardivement de ne pas désigner cette affection par un neutre d'apparence masculine mais par un neutre d'apparence féminine : la covid. Les Académiciens, qui ne se prononcent pas à la légère, ont émis la justification suivante : covid est ne contraction de Corona Virus Disease . Or,  disease , se traduit en français par le substantif féminin maladie , en foi de quoi l'article féminin est préférable . Cette démonstration académique est plus qu'imparfaite. " Nous l'allons montrer tout à l'heure " comme eut dit l'Immortel La Fontaine. Mais soulignons déjà que l'Académie s'est limitée à juger "préférable" de basculer du masculin le covid