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Poupée de cire, poupée de son

France 2, chaîne de télévision nationale, a coutume de diffuser et rediffuser chaque année un même documentaire sur le concours de la chanson de l'Eurovision. Bonne idée, car il est très bien fait. Mais ce serait une meilleure idée encore d'en supprimer un commentaire qui se veut élogieux mais se montre déconcertant d'incompréhension de l'art de Serge Gainsbourg dans son brillant maniement de la langue française et son talent d'auteur.

Dans ce documentaire de France 2, pour vanter la chanson Poupée de cire, poupée de son,  un sympathique ex-animateur nommé Patrick Sabatier en fredonne la mélodie et assène ensuite : "bon, avec une mélodie pareille, c'était pas grave d'avoir des paroles, "poupée de cire, poupée de son", disons-le, sans grand intérêt, assez enfantines."  Et paf dans ta gueule, Serge !

Puisque ce documentaire est diffusé et rediffusé, c'est que personne au sommet ni à la base de la direction des programmes de France 2, depuis des années, n'a compris le brio des paroles de cette chanson. Ce qui pourrait expliquer que les mêmes personnes choisissent, année après année, des chansons destinées à représenter la France au concours de l'Eurovision dont les paroles sont réellement sans le moindre intérêt, à la différence de celles de Gainsbourg.

À leur attention, fendons-nous d'une courte explication de texte de ces paroles délectables d'intelligence.

Il faut savoir qu'avant les matières plastiques, il existait trois matériaux principaux pour la fabrication des poupées : la porcelaine, la cire et le son (qui désigne ici le résidu de broyage des céréales dont on garnissait des poupées souples en tissu).

"Je suis une poupée de cire, une poupée de son" est un génial jeu de mots dont les doubles sens brossent avec concision l'autoportrait d'une starlette de la chanson réduite à la cire des disques qu'elle enregistre et au son qui sort de son charmant gosier de poupée chosifiée par son public et par le désir des garçons.

Nous versons une larme pour les paroliers d'égal talent, dont les textes vont continuer à ne pas être compris par les gens de télévision chargés de renouer avec le succès de Gainsbourg, mais sans avoir davantage compris la perfection de ce qu'il avait ciselé là, paroles et musique.

Ce qui explique sans doute les déroutes continuelles dans la sélection des chansons sans le moindre intérêt envoyées se faire exécuter à l'Eurovision depuis que les bons auteurs n'ont même plus envie d'adresser quoi que ce soit. Et nous en connaissons intimement... 


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Commentaires

Anonyme a dit…
Très intéressant ! Je n'avais pas saisi non plus le jeu de mots, qui est en effet génial. Mais même sans cette subtilité que je vais maintenant expliquer à tout le monde, les paroles n'ont rien d'enfantines.

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