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pour en finir avec l'ouest-e du pays


Pour en finir avec les fautes de prononciation journalistiques consistant à faire négligemment entendre des " -e- " qui n'existent pas à la fin de nos points cardinaux, le plus simple est sans doute... de les faire exister.

Chacun a pu remarquer que les professionnels de l'audiovisuel parvenaient sans peine à prononcer la succession de consonnes ST (style), mais qu'il semblait être au-dessus de leurs forces de prononcer correctement ce phonème ST suivi du phonème D, sans interposer le phonème E. C'est ainsi que l'est de l'Europe devient " l'est-e de l'Europe ", et tout à l'avenant.

Il est vrai qu'il est très difficile aux francophones d'articuler la triple consonne STD. Les anglophones y arrivent sans peine et sans marquer de pause : "he's the best director". Les Français ont beaucoup plus de mal à prononcer " le reste du temps " sans faire entendre le E muet de reste. C'est pourquoi, si besoin est, le seul moyen de prononcer correctement ouest du pays, est de marquer une courte pause entre ouest et du.

Mais la grande majorité des orateurs professionnels passent à côté de cette solution (la seule correcte dans ce cas), et se livrent à la prononciation d'une faute d'orthographe : "l'oueste du continent" (sic).

Devant ce constat, vieux de plusieurs décennies, la Mission linguistique francophone envisage de proposer une modification orthographique qui résoudrait le problème : écrire désormais oueste et este. La prononciation isolée serait inchangée. Mais la prononciation " ouest-e " et " est-e " devant D serait ainsi officialisée et licite. À la différence de son actuel statut officieux, elle cesserait d'être incohérente avec la graphie.

Cette évolution orthographique n'aurait rien de choquant ni d'absurde, puisque les mots ouest et est nous viennent de l'anglais west et east. Ils ont donc déjà subi une adaptation orthographique à l'élocution française et peuvent en subir une autre sans dommage. La question n'est même pas de savoir si l'erreur des professionnels de la parole peut ainsi légitimement peser sur l'évolution de la langue : elle pèse effectivement, et de tout son poids. Autant prendre ici acte de la trop grande difficulté de prononcer STD, plutôt que de se battre contre les moulins à vents - vent d'est ou d'ouest.

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Commentaires

alexandra cabri a dit…
Cela doit etre l'influence des mediteraneens et leur accent fleuri: "Et cette-e dame-e, elle prendra de la cote-e ou du jaret?"

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