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suite à

Initialement, l'expression ''suite à'' n'était employée que par dérision, au même titre que "rapport à". Pour singer la langue administrative ou militaire malhabile, dans des phrases comme : "Mon adjudant, j'voudrais vous causer rapport à l'invasion de punaises de cavalerie".

L'effet était comique car chacun sait d'instinct que la construction des locutions ''suite à'' et ''rapport à'' est absolument défectueuse ; puisque le complément de nom se construit avec la préposition de et non la préposition à : il convient de dire "le père de Louis" et non "le père à Louis".  De même : "la suite de l'action", et non "la suite à l'action".

En France, contrairement au Québec, cette dimension sarcastique a récemment été perdue de vue par des professionnels de la langue écrite et parlée devenus coutumiers d'employer suite à au lieu de après, depuis, à la suite de, par suite depour faire suite àen raison de, à cause de, grâce à, du fait de, pour, etc.

La même faute n'est pas encore constatée avec la locution "rapport à", qui reste cantonnée au registre de la dérision. Mais l'agonie des nombreuses expressions en parfaite santé* semble avoir débuté, au bénéfice de ce très bancal "suite à", subitement prisé par des millions de comiques troupiers qui s'ignorent.

* à la suite de, à cause de, en raison de, après, depuis, grâce à sont les principales victimes de l'épidémie de suite à.

Cet article initialement publié ici en 2008 est remis sur le dessus de la pile, en raison de la pandémie de "suite à" au sein de la population française.

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Commentaires

Anonyme a dit…
Un gros titre de presse : "un agent poignardé suite à un contrôle d'identité".
Non : "lors d'un contrôle" !

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