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Articles

Affichage des articles du 2023

drone, hydrone, géodrone, cosmodrone

L'anglais drone signifie bourdon . Non pas celui qui donne le cafard, the blues , mais l'insecte qui vole grâce au tourbillon d'air ascendant créé par ses ailes. Par analogie, le nom de cet insecte a été choisi pour dénomme des aéronefs sans équipage, fonctionnant par pilotage automatique ou téléguidé : les drones. On voit apparaître des engins de secours en milieu aquatique fonctionnant sur le même principe d'absence de pilote. Si ce n'est qu'ils ne volent pas mais flottent. Les désigner par le terme drone est donc un abus de langage. Des industriels ont imaginé de les dénommer "drones aquatiques", ce qui est un paradoxe ou un oxymore, comme on voudra, mais une solution défectueuse sur le plan lexical. La Mission linguistique francophone a été sollicitée pour réfléchir au moyen de combler cette lacune terminologique. Voici les propositions de néologismes que nous avons formulées à l'attention de la Commission d'enrichissement de la langue f...

s'enfuir et s'ensuivre, même combat

Le verbe s'ensuivre ne s'écrit pas en deux morceaux "s'en suivre". Pas davantage que le verbe s'enfuir ne s'écrit "s'en fuir" ou que le verbe s'enfermer ne s'écrit "s'en fermer". Le grand public peut s'y tromper. Mais des personnes faisant profession d'écrire en français ne devraient pas s'y méprendre. On trouve pourtant toujours des professionnels de la communication écrite qui vous écrivent des choses comme : " il s'en est suivi une grève des pilotes " (sic) [ Le Monde ] au lieu de " il s'est ensuivi une grève des pilotes ". Ces même professionnels n'écrivent pourtant pas " il s'en est gagé à s'en tendre avec nous " (sic) au lieu de " il s'est engagé à s'entendre avec nous ". C'est pourquoi nous leur rappelons qu'en bon français, le verbe s'ensuivre n'est pas sécable et se conjugue d'un seul tenant, comme tout...

accident de bébé

La RATP peine à formuler dans un français impeccable ses annonces sonores ou écrites. Tel un étranger s'égarant dans le dédale des couloirs, elle s'égare dans le sens des mots les plus simples. Ainsi, la RATP annonce-t-elle depuis plus de vingt ans des accidents voyageurs (sic) ou, moins ridicule mais non moins inexact, des accidents de voyageurs . Pour signifier par là qu'un voyageur a été accidenté. Or, en français, on ne désigne jamais un accident par la nature de la victime, mais toujours par la nature de ce qui a causé l'accident : accident d'avion , et non accident de passager ni accident de pilote de ligne ; accident de voiture , et non accident de passager ni accident d'automobiliste ; accident de ski , et non accident de skieur ; etc. Quand un bébé est victime d'un accident domestique [un accident causé par la vie à la maison] et qu'on appelle à l'aide, on ne dit pas : " Au secours ! J'ai un accident de bébé " ! Par c...

chronophage et capillotracté

Néologisme bien assemblé et teinté d'humour, l'adjectif chronophage connaît une faveur grandissante et méritée. Il n'existait jusqu'alors pas de mot pour qualifier ce qui prend du temps, trop de temps, ce qui dévore [suffixe - phage ] le temps [radical chrono- ]. Le mot chronophage gagne actuellement ses lettres de noblesse et peut désormais s'employer sans guillemets, dans les contextes les plus variés, avec ou sans touche d'humour. Il n'en va pas de même pour le plaisant " capillotracté ", néologisme correctement assemblé lui aussi, mais empreint par essence d'une connotation burlesque très marquée et que l'on réservera au registre de l'humour. Construction 100% latine, capillotracté signifie " tiré par les cheveux ". • • • POUR ACCÉDER À LA PAGE D'ACCUEIL DU SITE DE LA MISSION LINGUISTIQUE FRANCOPHONE,  CLIQUEZ ICI Pour prendre directement connaissance des missions de la Mission,  cliquez ici.

un ton comminatoire

La plupart des dictionnaires disponibles sur internet donnent mot pour mot la même définition de l'adjectif comminatoire , décrivant une manière de s'exprimer. " Qui a le caractère d'une menace ; menaçant. Style comminatoire, ton comminatoire ." Mouais... La nature exacte de la menace contenue en français courant dans la notion de ton comminatoire mérite d'être précisée : c'est un ton qui ne souffre pas la discussion ; un ton cassant, de supérieur à subalterne ; le ton sur lequel on donne sèchement un ordre dont l’inexécution sera sanctionnée. Ce n'est pas la menace du maître-chanteur ni du tueur à gages. C'est une menace de chef. Et c'est bien ce qui rend insupportable le ton comminatoire employé par qui n'est pas notre chef. • • • POUR ACCÉDER À LA PAGE D'ACCUEIL DU SITE DE LA MISSION LINGUISTIQUE FRANCOPHONE,  CLIQUEZ ICI Pour prendre directement connaissance des missions de la Mission,  cliquez ici.

ne lâchez rien, on ne lâche rien

Il y a dix ans déjà (23/12/2013), avant que "ne rien lâcher" soit devenu le leitmotiv éculé de tout compétiteur et tout négociateur, nous écrivions ce qui suit à propos de  cette expression dévorante qui fit sa grande percée en 2013. Un aimable animateur d'émission littéraire, voulant conclure un compliment à un jeune auteur prometteur, et l'encourager sans doute par ces mots à poursuivre sa carrière, lui dit à mi-voix : " ne lâchez rien ". " Ne rien lâcher " nous est venu du commentaire sportif, au sens de " résister" à ses concurrents, "surclasser" son adversaire, " poursuivre son effort ". De là, le tic verbal est passé au journalisme d'information générale dans une acception toujours plus vaste donc plus vague, puis s'est posé sur la langue courante et s'y accroche. Pour longtemps ? Peut-être pas. Le vent l'emportera. En guise de bain de bouche, la Mission linguistique francophone ...

les liaisons agonisent

Chacun admet que " deux ans " ne se prononce pas deu' ans ( hiatus ) mais deu' z' ans ( liaison euphonique ). Cette qualité instinctive de notre prononciation est mise à mal par les médias parlés de France, qui ont amplifié depuis deux décennies la surprenante mais fulgurante disparition des liaisons devant les euros , instaurée par les commerçants dès l'an 2000, comme si l'unité monétaire euro s'écrivait avec un H aspiré. Ce qui donne "vin euros" au lieu de vingt euros  naturellement lié comme vingt ans ou vingt autres . France 5, l'intéressante "chaîne du savoir" (c'est son slogan), a poursuivi ce travail de sape, en nous créant à partir de 2007 une pénible ribambelle de titres d'émissions à graphie ostensiblement défaillante, sur le principe de C à dire (sic) au lieu de C'est-à-dire . Connaissez-vous quelqu'un qui dise vraiment " cé à dire " au lieu de c'est-à-dire ? Il semble que ch...

Poupée de cire, poupée de son

France 2, chaîne de télévision nationale, a coutume de diffuser et rediffuser chaque année un même documentaire sur le concours de la chanson de l'Eurovision. Bonne idée, car il est très bien fait. Mais ce serait une meilleure idée encore d'en supprimer un commentaire qui se veut élogieux mais se montre déconcertant d'incompréhension de l'art de Serge Gainsbourg dans son brillant maniement de la langue française et son talent d'auteur. Dans ce documentaire de France 2, pour vanter la chanson Poupée de cire, poupée de son ,  un sympathique ex-animateur nommé Patrick Sabatier en fredonne la mélodie et assène ensuite : "bon, avec une mélodie pareille, c'était pas grave d'avoir des paroles, "poupée de cire, poupée de son", disons-le, sans grand intérêt, assez enfantines."  Et paf dans ta gueule, Serge ! Puisque ce documentaire est diffusé et rediffusé, c'est que personne au sommet ni à la base de la direction des programmes de Franc...

"le narratif" : une maladie de la langue qui affecte la narration et le récit

Essayons d'endiguer la récente vogue galopante consistant à employer par préciosité et par suivisme le terme impropre "le narratif" pour exprimer des notions qui s'appellent en réalité la narration, le récit, le discours, la communication . Et même la propagande, la calomnie, les élucubrations, la version des faits  ou la thèse , dans un titre comme celui-ci : "Le narratif de Poutine, c'est que les Ukrainiens sont des nazis ". Cette impropriété de terme procède d'une tendance à remplacer abusivement des substantifs féminins, tels • l'estimation • la description • la comparaison • la narration par leurs adjectifs masculins substantivés, que sont : • l'estimatif • le descriptif • le comparatif • le narratif. En qualité de professionnels de la parole et de l'écrit, journalistes, politiciens et pédagogues des sciences politiques seront bien inspirés de s'abstenir d'évoquer "le narratif de Poutine" au lieu de ce qu'il rac...

motif utile ou motif futile ?

Certains s'interrogent sur l'utilité de prononcer clairement en français les consonnes redoublées : i mm obile, i mm ense, i mm ature, i mm oral, a ll usion, i ll ogique, etc. Si un professionnel de la parole dit " i-mobile " ou " i-mense " au lieu de [ im-mobile ] ou [ im-mense ], tout le monde le comprendra. De même pour les "fautes d'orthographe sonores" suivantes : ilogique, imature, alusion, imoral , etc. Soumis à ces imprécisions phonétiques dans les médias parlés, nombre de locuteurs francophones perdent graduellement l'habitude de redoubler les consonnes, préférant l'économie d'effort articulatoire à la clarté de leur diction. Cette habitude de paresse s'étend à la prononciation de deux sons consonnes identiques qui ne sont pas au cœur d'un mot, mais se répètent en fin et en début de mots : baobaB Brûlé , par exemple. Certes, il est rare de parler de baoba b b rûlé, de cla m m agnifique, de la c c linquant, ou...

questionner, interroger, demander

Il existe une subtilité de sens entre interroger et questionner . Quand faut-il employer l'un ou l'autre de ces verbes ? Très simple : quand vous posez UNE question, vous ne questionnez pas ; vous interrogez ou vous demandez. • Vous demandez au pâtissier le prix d'une tartelette. • Vous interrogez l'office du tourisme sur les heures d'ouverture d'un musée. Toutefois, interroger peut aussi consister à poser plusieurs question, avec ou sans insistance : un juge d'instruction interroge ou questionne. Interroger et questionner sont alors synonymes. Tandis que le verbe questionner  suppose toujours que vous posiez plusieurs questions, et veilliez à en obtenir la réponse de façon suivie voire insistante . • Vous questionnez depuis des années la mairie sur la dégradation de votre quartier. • Les PUF  questionnent le monde (slogan publicitaire des Presses Universitaires de France, judicieux pour des ouvrages posant une multitude de questions sur le monde, et d...

veaux-l'ail (et autres chimères phonétiques)

Au journal télévisé de France 2*, une bonne nouvelle économique nous est annoncée : tel grand groupe rachète telle usine en faillite, sauvant ainsi deux cents emplois. Hélas, cette bonne nouvelle s'accompagne d'une autre, désastreuse : la journaliste qui relate cette information est payée pour massacrer la langue française aux heures de grande écoute et sans vergogne. Dans sa bouche, en effet, les volailles conditionnées dans cette usine deviennent des veaux -l'ail (sic). Et nul ne la corrige. La presse écrite, parce qu'elle est lue, traque sans merci les fautes d'orthographe dans ses articles. D'où vient que la presse parlée, alors qu'elle est écoutée, ne traque pas sans merci les fautes de prononciation de ses journalistes ? La Mission linguistique francophone rappelle charitablement aux rédacteurs en chef, journalistes et présentateurs de tous les médias parlés que le mot volaille est dépourvu d'accent circonflexe. Et que les orateurs profes...

2024 : la fin de la fin est annoncée

La Mission linguistique francophone pronostique la mort prochaine de la fin , remplacée par le final . Aussi invraisemblable que cela puisse paraître, la fin sera alors devenue du vieux français. Comme l 'avenir, remplacé par le futur (1). Retraçons les étapes de cette sénescence.  En dépit de l'existence de la locution à la fin et de l'adverbe finalement, la formule défectueuse " au final " (sic) s'est installée depuis plus de vingt ans ans dans le français courant .  Comme la tendance ne s'inverse pas mais s'accentue, les années 2020 semblent annoncer la mort de la fin elle-même, métamorphosée en  le final . L'expression " au final " (sic) a été maladroitement forgée au début du vingt-et-unième siècle par des cuistres médiatiques sur le modèle de " au total ". Rappelons-leur que " au " signifie " à le ". Or, le total ( au total ) ça existe en effet , tout comme existent le départ (...