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Articles

Affichage des articles du 2020

lynchage et bavure

  À propos du passage à tabac d'un suspect par un trio de policiers en marge d'une manifestation ayant échauffé les esprits et quelques véhicules livrés aux flammes, de nombreux commentaires médiatiques, juridiques et politiques ont été faits. Il s'est avéré que le sens du mot lynchage , que l'on croyait terriblement limpide, en venait à faire débat. Ainsi, le Premier-Adjoint au maire de la plus grande ville de France, dans laquelle cette manifestation violente eut lieu, déclara-t-il sur le plateau de FranceInfo TV mot pour mot ceci : " Nous sommes plus proches d'un lynchage que d'une bavure ". Or, non. Nous sommes pile dans une bavure et hors du lynchage . Car la terminologie est la suivante : • la bavure est un abus commis par des représentants de la force publique égarés ; • le lynchage est une exécution sommaire commise par une foule emportée ; • le crime de guerre est une atrocité commise par des militaires dévoyés. Mais il y eut simultanémen...

présumés coupables et présumée ignorante

"Pourquoi est-ce que les médias ne donnent pas les noms des présumés assassins, des présumés violeurs ?" (Marine Le Pen, présidente de parti politique, 16 juillet 2020) Encore débutante ou déjà chenue, lorsqu'on est une oratrice professionnelle de langue maternelle française, on connaît le sens du verbe présumer : "Croire d'après certains indices, se faire une conviction sans preuves" . On obtient du même coup la réponse à la question ci-dessus, faussement naïve et délibérément dévastatrice des libertés primordiales : on ne désigne pas comme coupables des personnes que l'on croit violeuses ou meurtrières selon certains indices mais SANS PREUVES . Cela évite les lynchages et, plus généralement, les dénonciations calomnieuses et les condamnations sans preuves ni jugement, qui sont des barbaries. Par ailleurs, Mme Le Pen - qui est juriste de formation - exploitait ici la légitime émotion suscitée par un homicide par violences volontaires ayant ...

"sur" : la préposition qui tue

L'invasion de la préposition " sur ", phagocytant toutes les autres, est assurément le plus grand fléau d'appauvrissement qui ait frappé la langue française en France depuis un demi-siècle. Excellent locuteur, généralement au-dessus de toute critique langagière, l'académicien des sciences morales et politiques et éditorialiste français  Alain Duhamel s'y laisse piéger à l'occasion : " Nous sommes toujours sur la même difficulté ."   (CNEWS, 1er juillet 2020) La préposition sur est ici employée à tort à la place de : • face à  la même difficulté • devant   la même difficulté • confrontés à   la même difficulté . Autre éventualité : on note que les tournures  "vous êtes sur" ou  "on est sur" ou "nous sommes sur " sont désormais de banales calamités devenues synonymes du démonstratif " c'est ". Le gallicisme qu'on supposait irremplaçable est détrôné. Porté par cette tendance qui ne l'eut pas e...

colocataires

On a pu constater après l'an 2000 une tendance à la féminisation erronée du mot colocataire , transformé à tort en " colocatrice " (sic). Alors même que personne ne songe à parler d'une " locatrice " au lieu d'une locataire.  Cette tendance est en légère régression. On peut espérer sa disparition. Car la désinence -trice est le féminin de la désinence -teur , et d'elle seule. Un lecteur, une lectrice ; un inspecteur, une inspectrice ; un dessinateur, une dessinatrice . Mais les mots se terminant par -aire , eux, ne varient pas du masculin au féminin ! Un propriétaire n'a pas pour homologue une " propriétrice ", mais une propriétaire ... De même pour adversaire, récipiendaire, milliardaire, millionnaire ou locataire qui peuvent être masculins ou féminins. Le sachant, un locataire et sa colocataire vécurent heureux et eurent beaucoup de petits colocataires. Mais pas une seule "colocatrice"... CLIQUEZ ICI POUR ACCÉDER...

chefs cuisiniers et chefs cuisinières

Pourquoi le néologisme " cheffe cuisinière ", que l'Académie française vient d'entériner très à contre-cœur et donc bien à tort, est-il instinctivement perçu comme difforme par la majorité des lecteurs du français ? En raison de sa féminisation ? Pas du tout. Ou pas directement. Chef cuisinière est irréprochable. Mais la variante "Cheffe" heurte le sentiment linguistique francophone en raison de l'incongruité de sa graphie. La transformation du -ef terminal de chef en ce lourd -effe terminal de "la cheffe" est vain, puisqu'il suffit de former la féminisation sur le modèle de la nef en écrivant sobrement : la chef . Cette féminisation mieux inspirée ne se calque pas par erreur sur le modèle de '' la greffe '' au lieu de " la nef ". Pourquoi par erreur ? Parce les adeptes de cette lourdeur n'ont pas vu que " la greffe " n'était pas le féminin d'un quelconque "le gref" ! Plus...

confinement : chez soi, chez nous, chez vous, chez eux

Alerte à la faute de syntaxe dans le texte de l'annonce télévisée du gouvernement français à l'attention des enfants et adolescents, concernant le confinement à domicile. Elle se conclut par : " Il faut tous rester chez soi " (sic). Non. Car soi est le pronom d'un singulier indéfini, et non d'un pluriel comme tous . Pour respecter la grammaire élémentaire de notre langue et le sens de ce message, ce " tous " impératif ne peut s'analyser que comme un synonyme de nous , vous ou ils. Ce qui se conjugue ainsi :  "il NOUS faut TOUS rester à la maison" donc chez NOUS" ; "il VOUS faut TOUS rester à la maison" donc chez VOUS" ; "il LEUR faut TOUS rester à la maison" donc chez EUX". Pas trace de ON, donc pas de place pour SOI.   L'erreur se corrige facilement en supprimant TOUS, ce qui restitue au moins à l'ensemble concerné son caractère indéfini, sinon singulier : " Il ...

influenceuse, influenceur

Ce malheureux jeune homme, emporté par une surdose de produit stupéfiant à 17 ans, était " influenceur beauté ". Par ce charabia juxtaposant deux termes sans lien syntaxique, il faut comprendre qu'Ethan prodiguait aux internautes des conseils de maquillage et de coiffure.  Telles autres personnes seront " influenceuses voyages "si leur activité consiste à vous rendre désirables des destinations touristiques, par la publication sur internet de leurs propres séjours là-bas. Les destinations en question les rétribuent en retour, directement ou indirectement, Influenceurs ... Quel intitulé de fonction... Quel concept affligeant... Il suppose que nous aurions besoin des services de personnes dont le métier ne serait pas de nous conseiller, nous orienter ni nous aider, mais plus insidieusement de nous "influencer". Ce nom de métier résonne comme une revendication anti-darwinienne : c'est fini, l'homme ne descend plus du singe mais du mouton d...

avoir ou donner des enfants

Sous la diffusion en ligne d'un très intéressant documentaire vidéo de Yann Lagarde sur l'inventeur britannique du culturisme, Eugen Sandow, un auditeur de France Culture laisse ce commentaire réprobateur : " Je réagis à ceci : "Il épouse une femme dont il a deux filles"... étonnante manière de dire les choses. Je pensais qu'on avait des enfant avec une femme, alors que j'ai des poules dont je mange les œufs ." L'émotion de l'auditeur n'est pas fondée. Car cette manière d'évoquer la fertilité d'un couple humain n'est ni étonnante ni déplaisante. C'est une des expressions usuelles du français, courant et littéraire, pour exprimer la chose. Il ne faut pas voir le mal où il n'est pas. Car cela peut se dire de diverses manières courantes, dont aucune n'est critiquable.   Les deux premières sont interchangeables entre femme et homme : • " Elle épouse Lionel dont elle aura un fils " (le choix irréprochable de ...

réprimer ou réprimander ?

"Plusieurs villes réprimandent l'absence de port du masque" (nous dit un journaliste de télévision lisant son prompteur) C'est mignon tout plein, mais c'est faux : ces communes ont décidé de RÉPRIMER l'absence de masque. Au-delà de l' admonestation, puis de l' avertissement , leurs maires ont décidé que l'heure n'était justement plus aux réprimandes mais aux amendes à 130€. Donc à la répression, qui est le fait de réprimer et non de réprimander . De plus, on ne réprimande pas une faute mais une personne qui la commet. Car réprimander est synonyme de gronder . CLIQUEZ ICI  POUR ACCÉDER À LA PAGE D'ACCUEIL DU SITE DE LA MISSION LINGUISTIQUE FRANCOPHONE

les misères du son Ê en fin de mots

"Vous aviez dit que vous ne feriez plus d'interviews du 14 juillet, que c'étez terminé."   (Léa Salamé, journaliste interrogeant le président de la République française, 14 juillet 2020) Dès son entrée en matière, cette intelligente locutrice professionnelle dépourvue de tout accent régional, promeut une envahissante coquetterie de la diction médiatique : la préciosité articulatoire par laquelle les terminaisons de étiez et était  ne sont plus différenciées. Et cela au détriment du son Ê, déformé en son É.  Ainsi, lait et laid deviennent-ils lé . Et ainsi la prononciation de nos verbes au conditionnel et à l'imparfait devient-elle plus qu'imparfaite... Les sons -AIS, -AIT et -AIENT, très caractéristiques de ces temps de conjugaison, sont trahis comme par des illettrés qui croiraient bon de les réécrire à leur guise : "je voudré vous voir, tu été parti, elles pleurez de rage". Ce que Mme Salamé prononce ici C'ÉTEZ (ou SÉTEZ ou C...

une médaille n'est pas une breloque

Bien que se déroulant dans la capitale mondiale de la francophonie , la  fête olympique de 2024 sera-t-elle marquée, une fois encore, par une dé-fête de la langue français chez les commentateurs sportifs francophones ? Peut-être pas. Ayons confiance en cette équipe d'orateurs et rédacteurs professionnels. Soutenons-la. Soutenons-la, oui. À ne pas confondre avec le faux sens aberrant " supportons-la ", cet anglicisme qui signifie en (vrai) français que nous souffrons en silence, pour finir par exploser : " je ne te supporte plus !" Les commentateurs sportifs les plus en vue se sont parfois surpassés dans le dérèglement lexical [= mauvais choix des mots], syntaxique [= mauvais agencement des mots entre eux] et phonétique [= mauvaise prononciation des mots], ce qui les rendait difficilement... supportables. Sur la première marche du podium de cette perte de repères langagiers : les  médailles , si noblement méritées, sont désormais qualifiées par certains journali...

esquimau

" Un glacier-pâtissier danois renonce au terme esquimau, qu'il juge offensant pour ce peuple " (information parue dans le quotidien 20 Minutes, 28 juillet 2020) Zut, il va falloir renoncer à lapin chasseur , offensant pour les lagomorphes et les fines gâchettes, à charlotte aux fraises , offensant pour les Charlotte, à Paris-Brest , blessant pour les cheminots, à éclair au chocolat , moqueur envers Zeus et sa foudre, à daube provençale car c'est pas de la daube quand même la Provence ! Il va falloir aussi renoncer à cravate , déformation offensante de l'adjectif ethnique croate , et ne plus pendre à nos oreilles des créoles ni nous chausser de spartiates . Cette stupidité bien-pensante procède d'une perte de repères linguistiques : dans de telles métonymies gourmandes ( esquimau pour crème glacée, flûte pour verre de champagne ou son contenu, Brillat-Savarin fromage empruntant le nom de famille d'un gourmet) il y a au contraire hommage aux not...

s'exposer (selon Alice Coffin)

"En ne conduisant pas, je m'expose à ne pas mourir sur la route." (paraphrase d'une déclaration faite par une élue municipale française du nom d'Alice Coffin à une chaîne de télévision étrangère) Nous paraphrasons ici avec la plus grande fidélité dans le contresens une déclaration d'une conseillère municipale parisienne dont la violence diffamatoire à l'encontre de la moitié masculine de ses électeurs a fait tressaillir d'indignation ou sauter de joie, mais dont le mauvais maniement de la langue n'a pas même été relevé dans ce tohu-bohu. Voici la déclaration accusatoire dans sa forme originale : " En n'ayant pas de mari, je m'expose à ne pas être violée, tuée, tabassée (...) et mes enfants non plus ". Or, la formule verbale " s'exposer à"  ne peut introduire qu'un complément négatif. On s'expose à mourir en allant à la guerre, on s'expose à échouer à un concours en s'y présentant. Mais on n...

ministres démis de leurs fonctions

"Victoire. Les ministres B..., C..., P... enfin démissionnés." ( Jean-Luc Mélenchon, Twitter, 5 juillet 2020) Voilà un barbarisme peu digne de l'éloquence de ce tribun. Car des ministres DÉMISSIONNENT ou SONT DÉMIS (de leurs fonctions), mais ne sont pas "démissionnés". Ni eux ni personne.  De même, une personne qui s'alimente n'est pas "mangée", elle mange. La confusion entre les significations d'un même verbe selon qu'il est employé à la forme active ou passive est en principe une erreur qu'on ne commet plus au sortir de l'école élémentaire ; faute de quoi on n'est pas admis au collège. Et moins encore admis à rédiger des messages officiels, fussent-ils révolutionnaires ou révoltés. Veillons avec soin sur toute langue vivante, vivante donc fragile. Car il est une forme d'insoumission à la structure porteuse du langage qui ne grandit personne et ne lutte pas dans le bon sens. POUR ACCÉDER À LA PAGE D...

en charge de : un anglicisme envahissant

" Vous avez été ministre en charge de la santé. " (Brigitte Bourguignon, Assemblée nationale française, 2 juillet 2020) Depuis des années, c'est la tournure anglophone " in charge of " qui est ici francisée mot à mot, par négligence et par suivisme, pour donner  EN CHARGE DE  au détriment de  CHARGÉE DE " Vous avez été ministre CHARGÉ DE la santé" ou plus simplement encore "vous avez été ministre DE la Santé", voulait dire la présidente de la commission parlementaire, elle-même  chargée de  se pencher sur les éventuels faux pas du bal masqué sanitaire. Les organisations publiques et privées seront bien inspirées de mettre à profit les semaines d'été pour rectifier cette faute dans leurs organigrammes. Nous invitons leurs dirigeants et leurs interlocuteurs à se convaincre de cette nécessité en se souvenant que l'on porte le titre de Chargée ou Chargé de mission et non celui de "En charge de mission". De même, ...

feuilleton estival de la langue mal pendue [4]

4• " Ils vont devoir me remettre une stratégie zéro déchet dans les trois mois . " (Brune Poirson, dans ce clip officiel produit par le ministère français de la Transition écologique et solidaire, 4 juillet 2020) " Remettre une stratégie zéro déchet " ? Mme Poirson est-elle bien sûre de ce qu'elle dit et de la manière dont elle le formule, après mûre réflexion en compagnie de ses conseillers et avec la bénédiction de sa ministre de tutelle ? Manifestement, oui, elle en est satisfaite. Elle se fait même filmer le disant, et sous-titrer pour enfoncer le clou. Triple faute, pourtant. Condensées en trois mots, ces trois fautes ou erreurs révèlent un niveau stagnant de pollution culturelle de la langue, mazoutée par les solvants du marketing, asphyxié par le jargon et le compactage d'une pensée réduite à ses seuls mots-clefs . A/ Le choix du verbe est impropre : en français on ne " remet " pas une stratégie, à moins de la remettre à ...

quand tout est "sécurisé", plus rien n'est sûr...

Réédition de notre article de 2010 En France, le discours politique des premières années du vingt et unième siècle a été pétri de considérations sur la sécurité et le sentiment d'insécurité. Si le vif succès du mot " insécurité " n'appelle pas de mise en garde, il n'en va pas de même pour l'emploi des barbarismes " sécuriser ", " sécurisé ", " sécurisant " et " sécurisation ", actuellement omniprésents dans le vocabulaire des médias et, par contrecoup, du public. Car quand tous est " sécurisé ", plus rien n'est sûr ni certain. Des termes précis au sens exact, non interchangeables, sont anéantis par ce terme passe-partout au sens vague, emprunté à l'anglais, et qui semblent avoir irrémédiablement appauvri notre langue. Si "évolution" il y a, elle se fait ici par atrophie, par infection. Il en résulte une infirmité dont les orateurs professionnels ne semblent pas s'aviser. Les cho...

des temps difficiles (et non compliqués)

"Merci de diffuser de la bonne musique en ces temps compliqués." (au courrier des auditeurs de France Musique, 11 juin 2020) Fausse note : le mélomane qui a eu la courtoisie de prendre le temps de remercier Radio France voulait en réalité évoquer des temps difficiles et non "compliqués". Nous avons déjà analysé en détail cette atrophie croissante du vocabulaire causée par la focalisation obsédante et paresseuse sur le qualificatif compliqué ,  au détriment de dizaines d'autres termes plus adaptés et plus fins. Mais il se confirme e mois en mois que la substitution s'effectue en premier lieu au détriment de difficile , comme dans cet exemple. Les temps difficiles sont un syntagme, une "expression figée" bien connue. Hélas, le déferlement des compliqués dans la langue des médias depuis 2010 a submergé les cerveaux au point que même le vocabulaire du plus aimable et du moins inculte des auditeurs s'y noie ou s'y enlise. Le recours ...

Le Monde choisit les autrices

Le 29 mai 2020, se pliant de bonne grâce à la préconisation de l'Académie française, le célèbre quotidien francophone Le Monde a décidé d'abandonner la maladroite féminisation purement graphique "auteure", et d'opter pour la féminisation en profondeur autrice , dont le son et l'image s'allient pour distinguer, avec netteté, ce féminin du masculin ou neutre  auteur . Nous ne pouvons que l'en féliciter et inviter le monde entier à faire de même. AUTRICE s’harmonise avec actrice . Mais surtout avec lectrice, rédactrice et toute la chaîne de l'écriture et de la lecture ( éditrice , correctrice, traductrice, etc), comme auteur s'harmonise avec lecteur, rédacteur et toute la chaîne précitée. Cette cohérence interne est salutaire à toute langue vivante :  elle en consolide la clarté et la simplicité au lieu de les saper. AUTRICE sonne aussi agréablement qu’ actrice, cantatrice, médiatrice, institutrice , éducatrice , directrice , et t...

liaisons mal t'à propos

"Des ex-e-z'employées municipales l'accusent."   (un journaliste de BFM TV, flash-back de mai 2011 concernant la pratique de la réflexologie par Georges Tron, ministre démissionnaire) La foule des professionnels de la parole qui pratiquent la paragoge ne cesse de grossir. La paragoge consiste à prononcer une voyelle qui n'existe pas. Cette faute de phonétique était autrefois réservée aux enfants en bas âge et aux accents méridionaux emportés par leur fougue chantante. Lorsque le journal Ouest-France devient " Ouest'e-France ", il y a paragoge. Quand l' ex-femme devient ex'e-femme ou quand l' expatrié devient ex'e-patrié , il y a paragoge. Et quand un commentateur professionnel de l'actualité politique nous parle des accusatrices d'un ministre démissionnaire en les désignant, non pas comme d'ex-employées municipales ni, par paragoge, comme des "ex'e-employées", mais carrément comme des "ex...

demander à ce que

En France, on commence à entendre dire " je demande à ce que ". Et même : "il faut vérifier à ce que" (pour il faut vérifier que ) et "ça va permettre à ce que" (pour ça va permettre de ). Cette difformité grammaticale majeure est capable d'affecter aussi bien un colonel de pompiers s'exprimant au micro de France Inter qu'un premier adjoint de la mairie de Paris (notre photo) intervenant dans le journal de France 3. L'Académie française, elle aussi, a relevé cette fâcheuse apparition et en cerne mal l'origine dans l'esprit des orateurs ne sachant plus dire simplement et correctement " je demande que " ou " je vérifie que ". Ce télescopage fautif est peut-être le résultat de l'amalgame entre deux tournures correctes : je demande à [ je demande à être informé ] parasité par une dose de   je demande que   [ je demande que l'on m'informe ]. On peut aussi supposer que cela résulte d'une inte...

distanciation physique ou sociale ?

Fallait-il copier servilement l'anglais et parler de " distanciation sociale " ou fallait-il préférer " distanciation physique ", formule moins suspecte de ségrégation ? Ni l'un ni l'autre. Car notre langue dispose d'une ressource plus sobre : le pluriel du mot distance, grâce auquel "garder ses distances " dit tout, sans qu'il soit besoin d'un qualificatif. Encore fallait-il que les divers conseillers ministériels et les divers commentateurs linguistiques s'exprimant dans les médias n'aient pas pris trop de distance avec la simplicité et la subtilité intrinsèque du français courant. Illustration : épicier masqué conservant ses distances à Saint-Jean-de-Fos, France POUR ACCÉDER À LA PAGE D'ACCUEIL DU SITE DE LA MISSION LINGUISTIQUE FRANCOPHONE,  CLIQUEZ ICI

de l'enfance à l'enfonce

Après l'éviction du son " -ê- " en fin de mots, remplacé par le son " -é- " ( sifflet devenant sifflé ; j'avais devant j'avez ), et la perte de distinction entre le " -o- " ouvert (o de bol ) et " -Ô- " fermé (o de beau ), le style oratoire médiatique de France nous apporte maintenant la mutation du son " -en- " en son " -on- ". Dans la bouche de l'excellente Fabienne Sintès comme celle de la chatoyante Léa Salamé (Radio France), par exemple, enfance devient on fonce ; pente devient ponte ; l'attente devient la tonte , etc. Pour comprendre ce phénomène apparu en France peu avant 2010, il faut savoir que la prononciation de la nasale " -on- " demande un tout petit peu moins de travail musculaire que la prononciation de la nasale " -en- ". L'économie d'effort est certes négligeable, mais elle suffit au mieux-être des orateurs enclins à cette paresse articulatoire. La Mi...